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21 mars 2009

Ce samedi, dans le milieu de la matinée, Simone

   Ce samedi, dans le milieu de la matinée, Simone entrebâilla sa porte pour laisser sortir le chat : «- Allez Puce ! Vas faire un tour ! ». Le chat, un chartreux aux yeux d’or, s’étira, griffant le paillasson. Brusquement il s’immobilisa, oreilles dressées. La porte du nouveau voisin s’ouvrit. Il apparut drapé dans une robe de chambre écarlate. Le chat avança vers lui, arrondit le dos et commença à ronronner.

   - Permettez-moi de me présenter chère madame… signor Antonio Vanini. Très heureux de faire votre connaissance !

   - Heu… Simone Biard, enchantée…

   - Ma ! Chère madame Biard, il me ferait plaisir de vous offrir un café. Si vous voulez excuser ma tenue !

   - C’est que je le bois très léger…, commença Simone.

   - Et bien il sera à votre préférence, moi, je le prends très fort !

    A la fois défiante et curieuse Simone hésitait. Vanini eut un large geste d’invite qui la décida.

   - Accommodez-vous per favore. Il avança un fauteuil près d’une petite table ronde. Puce, hardiment, visitait déjà les lieux. Une bibliothèque regorgeait de reliures. De nombreuses photographies encadrées pavoisaient les murs. Avec cérémonial, Vanini apporta un plateau nimbé d’une bonne odeur de café chaud.

   - Permettez que je vous serve…

   - Merci monsieur Varini..

   - Pas Varini, Vanini, à votre service !

   Tout à coup, Simone sursauta. Un cri rauque avait jailli d’un coin du salon.

   - Ne craignez rien madame, c’est seulement monsieur Toto qui vous salue !

   Le chat bondit sur les genoux de sa maîtresse. Le perroquet sur son perchoir se dandinait d’une patte sur l’autre. Il finit par leur tourner le dos.

   Simone finissant par se sentir à l’aise buvait son café à petites gorgées.

   - Sans vouloir être indiscrète monsieur Vanini, en quoi consiste votre métier ?

   - Chère madame, je suis un illousionniste ! Un prestidigitateur !

   - Comment vous est venu la vocation ?

   - Voilà : quand j’avis huit ans, nous habitions Alzano, un petit village près de Bergamo.

   - Une nuit, je suis allé sur la place vider un paquet de lessive dans la fontaine. La mousse a monté, monté et débordé. Elle a couvert la place jusqu’aux murs des maisons. Un mauvais camarade est allé me dénoncer aux carabiniers. La punition c’était de ranger toute la bibliothèque du juge. Des centaines de livres ! Par hasard un livre de magie m’est venu dans les mains. Je l’ai emporté et lu la nuit en cachette ! Ce jour-là, j’ai décidé de mon futur métier. Et voila, à quinze ans, j’ai réussi à me faire engager par un magicien. Que cet homme-là il m’a tout appris ! A propos, madame Biard, vous connaissez Salvador Dali ?

   - Heu non… attendez çà ne serait pas celui qui fait de la publicité pour du chocolat 

   - Mais si ! Figurez-vous que ce bonhomme a prétendu que la gare de Perpignan était le centre du monde ! Et bien entre nous, madame Biard, il s’est trompé ! Le centre du monde c’est la gare de Lyon !

   Simone enchanté de son voisin, regagna son logis en chassant Puce devant elle.

…..

   Un vent aigre jetait des aiguilles aux visages rougis. Marcelle s’était engouffrée dans la tiédeur de leur brasserie habituelle. A travers la vitre, elle vit Antoinette qui se hâtait pour la rejoindre.

   - Assieds-toi ma chère ! Tu veux un café ?

   - Oui, j’suis toute engourdie ! Mais teu sais pas la dernière !... m’est arrivé une drôme d’histoire ! Teu vas pas vouloir le croire : on a voulu m’violer !

   Marcelle écarquilla les yeux.

   - Non ! Tu me fais marcher !

   - Pisque j’te l’dit ! Se fâcha presque Antoinette.

  - Hier après-midi, j’étais dans ma loge en train d’coudre assise sur mon lit. Voila quelqu’un qui cogne au carreau. Entrez que j’fait !

   C’était un bonhomme que j’avais jamais vu…

   - Un vieux ?

   - Mais non. Un jeune dans les vingt-cinq ans !

   - Ah bon ! Et alors ?

   - J’ai d’mandé c’qui voulait ! Y m’répond : - Je suis venu vous souhaiter une bonne fin d’année ! ». Ca m’a étonné vu que j’le connaissais pas. Voila qui m’dit : - Je peux vous faire la bise ? ». Bon, pourquoi pas ? J’suis pas bégeule !

   Alors, il fait : « - On pourrait pas aller un peu plus loin ? ». Sur le coup, j’réponds : – ben où que c’est qu’vous voulez aller ? Y m’répond : - On pourrait faire l’amour ».
   - Le dégoûtant ! S’exclama Marcelle.
   - J’me suis foutue en pétard ! j’ai crié, espèce de saligaud Teu vas m’foutre le camp teu d’suite ! J’tenais mes ciseaux en l’air, prête a y en fiche un coup dans l’ventre !

   Il a pas d’mandé son reste j’te prie de croire !

   - Ca alors ! Tout de même ! Répéta Marcelle estomaquée en dévisageant sa copine. Soudain une pensée lui vint à l’esprit.

   - Mais tu te rends compte ma vielle, si il t’avait sauté dessus et tu lui ais donné un coup de  ciseaux et qu’il soit mort !... La police aurait jamais voulu te croire…

   Antoinette prit un air mi figue mi raisin. Le garçon qui passait à ce moment-là, chargé d’un plateau, eut le malheur de renverser le sac à provision posé par terre.

   - Teu peux pas faire attention andouille mal ficelée !

…..

   Dans quelques jours ce sera Noël ! Les guirlandes étoilées zigzaguent entre les façades. Un évènement important se préparait. Marcelle allait avoir soixante quinze ans. Il fût décidé qu’un banquet aurait lieu à « La Biche au Bois ». L’imposante Julienne se trouverait du nombre. Monsieur Vanini y avait été chaleureusement convié ainsi que trois vieux amis du quartier.

…..

   Une grande table leur avait été réservée. L’aimable patron offrit spontanément une bouteille de champagne. Les coupes tintèrent. Au diable les régimes et les résultats d’analyses ! Marcelle arborait un col à grandes pointes de dentelle.

   Simone, arrivée la première, avait caché le cadeau sous la banquette.

   Les joues commencèrent à rosir. Elles sont gaies, elles rient. Le passé dort dans les albums photos. Maître Vanini se trouvait assis entre Marcelle et antoinette. La tiédeur du lieu dépenaille les tenues.

   - C’est peut-être le moment d’offrir not’cadeau ! lance Antoinette.

   - Mais oui ! Renchérit Simone.

   - Vous êtes folles ! Il ne fallait pas ! gronde Marcelle. Hier, ma sœur m’a déjà apporté un cadeau… devinez quoi !

   - Une robe de chambre !

   - Une cocotte-minute !

   Marcelle rigole : - Mais non ! Une machine à espressos. C’est bête ! Chez moi je bois seulement de la chicorée ! Si tu veux Simone, je te la donne.

   Un silence embarrassé suivit cette déclaration. Consternée, Antoinette piqua du nez sur son assiette. Julienne toussa, regarda Simone qui levait les yeux au ciel, puis se décida à sortir le carton enrubanné qu’elle posa devant Marcelle.

  - Vous êtes bien silencieuses mesdames ! dit monsieur Vanini d’un air narquois.

   - C’est drôle… commença Simone qui s’arrêta là.

   Julienne s’interrogeait « laquelle avait eu l’idée de la machine à espressos ? Antoinette, Simone ? ».

   Heureuse comme une gamine, Marcelle défaisait patiemment l’emballage. Elle entrouvrit le carton. Son visage s’illumina.

   - Oh ! Comment avez-vous deviné ?

   Elle en bégayait. Avec précaution, elle mit à jour une superbe « pendule à coucou ». Un chalet au bois délicatement découpé abritait l’horlogerie. Avec des fenêtres aux volets vernis et un balcon à la balustrade finement ajourée sur lequel se tenaient deux personnages en costume tyrolien. Sur le cadran aux chiffres émaillés la grande aiguille marqua quatorze heures. Sous l’auvent un volet s’ouvrit. « cou-cou…cou-cou ». L’oiseau battit des ailes et réintégra son logement.

   Il y eu un moment de stupeur… Juliette en était tourneboulée ; elle avait tout de même bien acheté une machine à café ! Simone en  restait bouche bée.

   Marcelle s’exclama : - C’est épatant ! J’en rêvais depuis toute petite !

   Monsieur Vanini imperturbable lissa ses moustaches et dit :

   - Mesdames… le mystère il est piou intéressante qué la soloutione !

.. …

   Dans le grand lit, Marcelle ne dort pas. Elle s’est couchée de bonne heure. Les gens vont réveillonner. Bientôt une nouvelle année va commencer…

   Elle se sent de jour en jour un peu plus fragile. Comme si elle se trouvait sur une barque que dérive lentement vers le large. Une perle opale se forme au coin de l’œil, glisse et va se perdre aux sillons de la joue.

   « cou-cou… cou-cou ». Le cri comique et joyeux l’a fait sursauté. Il est minuit ! Elle se met à rire. Allons tout va bien, la vie est une extraordinaire aventure ! Joyeux Noël !

                                                      

                                                                           Fin

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