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21 février 2009

Mortel transfert Dans cette vie merveilleuse et

Mortel transfert

                          Dans cette vie merveilleuse et  terrible où la robe des fées cache parfois

                          le mufle d’un monstre…    

    J’ai tapé cette première phrase sur mon clavier et je reste devant la page blanche, l’esprit vide… Cette si importante première phrase qui accrochera ou non le lecteur.

   Bientôt minuit. Dans le silence, un cœur mécanique scande les secondes. Je vais à la fenêtre, j’entrouvre le rideau. Une nuit froide couvre les toits. Dans la cour, les arbustes secouent lentement un feuillage noir. Le pavage paraît huilé. Juste en face, dans le mur du bâtiment B, se découpe un rectangle de lumière filtré par un store.

   Mon voisin doit être comme chaque nuit debout devant son chevalet… Il a emménagé, cela doit faire environ deux mois, dans cet ancien atelier de confection.

  Dès le premier jour, face à la fenêtre de mon bureau, j’ai aperçu une grande toile accrochée au mur : un portrait d’homme assis avec un chat couché sur les genoux.

  La façade du bâtiment B n’est distante que d’une trentaine de mètres mais on ne voyait bien la toile que le soir, lorsque les reflets s’estompaient sur les vitres. Peint en noir et blanc, ce tableau a tout de suite exercé sur moi une étrange fascination. J’attendais de rencontrer celui que je supposais en être l’auteur. Nous nous sommes croisés sous le porche. J’ai découvert un petit homme d’origine chinoise au visage lisse : une pointe de poils noirs au menton, des yeux gris pétillants derrière les verres ronds. Il était vêtu d’une vareuse noire et serrait sous son bras un grand carnet à croquis.

  Après m’être présenté, je lui fis comprendre que je m’intéressais à la fameuse toile. Il m’invita sur le champ à visiter son atelier.
Dans la pièce principale, des châssis de différents formats, posés à même le plancher, étaient tournées face au mur. La seule peinture exposée était celle qui était visible de chez moi. Tandis que je m’en approchais, mon voisin débarrassa une chaise couverte de taches d’encre. Je fus surpris par la facture de l’homme au chat. Vu de près, c’était une calligraphie de signes tracés d’une main nerveuse. Dès que l’on reculait de quelques pas les lignes s’assemblaient en un dessin précis et contrasté. Dans le visage couturé de rides, les yeux de l’homme vous fixaient intensément. Une main anguleuse se découpait sur le chat endormi.

   Mon hôte voulu absolument me faire asseoir. Il se montra peu loquace, s’exprimant  souvent par signes. Je présumai qu’il ne possédait pas bien la langue française.

  Notre cour de la rue de Charenton était encerclée d’artistes et d’intellectuels : deux architectes, deux sculpteurs, un chanteur, un physicien… J’étais le seul écrivain.

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